Pays-Bas

[NL] Nouveaux éléments d'orientation sur les dispositions relatives à la protection de la vie privée applicables aux partis politiques dans le cadre des campagnes électorales

IRIS 2024-5:1/12

Ronan Ó Fathaigh

Institut du droit de l’information (IViR)

Le 5 avril 2024, l'Autorité néerlandaise de protection des données (Autoriteit Persoonsgegevens – AP) a adopté de nouveaux éléments d'orientation particulièrement pertinents sur les dispositions relatives à la protection de la vie privée applicables aux partis politiques néerlandais dans le cadre des campagnes électorales, et ce en vue des prochaines élections au Parlement européen, qui se tiendront en juin 2024. Ces éléments d'orientation prévoient notamment que l'AP exige des partis politiques qu'ils « prennent acte » et mènent leurs campagnes « autant que possible » dans le respect et « dans l'esprit » du règlement de l'Union européenne relatif à la transparence et au ciblage de la publicité à caractère politique, qui n'entrera officiellement en vigueur qu'à partir de 2025 (voir IRIS 2024-3/6). Le document d'orientation reprend également les précédentes lignes directrices applicables aux partis politiques en matière de protection de la vie privée pendant les campagnes électorales, adoptées par l'AP en 2021 (voir IRIS 2021-5/15).

Ces éléments d'orientation ont pour objectif de faire connaître aux partis politiques les dispositions du règlement général sur la protection des données (RGPD) relatives aux campagnes électorales. Ils seront fournis aux directeurs de campagne, aux équipes de campagne et, le cas échéant, aux organisations tierces qui assurent le traitement des données à caractère personnel pour le compte de partis politiques dans le cadre d'une campagne électorale. L'AP observe que les partis politiques traitent de plus en plus de données à caractère personnel pour réaliser des campagnes (ciblées) ; et cette quantité de plus en plus importante de données à caractère personnel disponibles au sein de la société peut être exploitée pour établir des profils de personnes, les organiser en groupes et leur transmettre des messages (politiques) spécifiques de manière extrêmement ciblée. Sur ce point, les éléments d'orientation énoncent un certain nombre de lignes directrices qui concernent spécifiquement les partis politiques.  

Premièrement, l'AP rappelle que les données relatives aux opinions politiques de particuliers bénéficient d'une « protection supplémentaire » prévue par le GDPR, et que le traitement de ces « catégories spécifiques » de données à caractère personnel est généralement interdit en vertu de l'article 9 du GDPR. Cette interdiction de traitement comporte un nombre limité d'exceptions, parmi lesquelles le consentement explicite de la personne concernée. L'AP précise notamment que les partis politiques sont autorisés à procéder au traitement de ces données uniquement après avoir obtenu le « consentement explicite » des personnes concernées, et qu'ils « doivent être en mesure de démontrer que les exigences en matière de consentement explicite ont été respectées ». Deuxièmement, l'AP fait également remarquer que l'interdiction générale de traitement des données à caractère personnel qui révèlent des opinions politiques prévue à l'article 9 du GDPR implique qu'il est « difficile d'imaginer » que les fichiers qui contiennent des données à caractère personnel sur certaines opinions politiques (présumées) des citoyens et qui sont proposés aux partis politiques « par des tiers » ont été « établis de manière licite ». En effet, l'AP estime que les partis politiques sont « conjointement responsables du traitement des données » avec ces tiers. Troisièmement, et ce point est fondamental, l'AP considère que les partis politiques doivent être « vigilants à l'égard des organisations qui offrent des services publicitaires spécifiquement adaptés à des préférences, des groupes cibles ou des caractéristiques personnelles », et qu'ils ne doivent « collaborer qu'avec des organisations qui respectent les exigences du RGPD ». Par ailleurs, si les partis politiques souhaitent réaliser une campagne ciblée et faire appel à un tiers, ils devront au préalable procéder à une évaluation de l'impact sur la protection des données et répertorier les choix qui ont été faits dans le cadre du processus décisionnel. Quatrièmement, pour ce qui est des logiciels de traçage, l'AP estime que les logiciels de traçage tels que les cookies et les pixels espions (tracking pixels) ne doivent pas être utilisés, de manière directe ou indirecte, pendant les campagnes électorales.

Les éléments d'orientation indiquent en conclusion qu'en ce qui concerne les élections européennes à venir, le Parlement européen conseille aux partis politiques de prendre connaissance du règlement de l'Union européenne sur la transparence et le ciblage de la publicité à caractère politique, lequel doit encore être publié au Journal officiel et ne devrait entrer en vigueur qu'en 2025. L'AP recommande toutefois aux partis politiques de mener leurs campagnes « autant que possible » dans le respect et « dans l'esprit » du règlement.


Références


Liens

IRIS 2024-3:1/6 Adoption par le Parlement européen de la proposition de règlement relatif à la transparence et au ciblage de la publicité à caractère politique  

IRIS 2021-5:1/15 [NL] Nouvelles lignes directrices sur les dispositions applicables aux partis politiques en matière de respect de la vie privée pendant les campagnes électorales

Cet article a été publié dans IRIS Observations juridiques de l'Observatoire européen de l'audiovisuel.