Allemagne

[DE] Le Bundestag adopte la loi sur les services numériques et renforce les pouvoirs des régulateurs des médias

IRIS 2024-5:1/21

Dr. Jörg Ukrow

Institut du droit européen des médias (EMR), Sarrebruck/Bruxelles

Le 21 mars 2024, le Bundestag a adopté le projet de Digitale-Dienste-Gesetz (loi sur les services numériques  - DDG) portant transposition de la Directive relative à un marché unique des services numériques et promouvant l’équité et la transparence pour les entreprises utilisatrices de services d’intermédiation en ligne. Le vote du Bundestag s’appuie sur une recommandation de la Commission sur le numérique. L’objectif de la DDG est d’harmoniser le droit allemand avec le Règlement sur les services numériques (DSA) de l’UE et de clarifier les questions en suspens concernant l’exécution dudit règlement. Le DSA et les directives de la DDG qui en découlent doivent permettre en premier lieu de mieux lutter contre les contenus illicites en ligne tout en renforçant la protection des internautes.

Le paquet législatif comprend plusieurs volets : tout d’abord, la Telemediengesetz (loi sur les télémédias - TMG), qui transposait jusqu’à présent la majeure partie de la Directive e-commerce et certaines dispositions de la Directive Services de médias audiovisuels, est entièrement abrogée tandis que la Netzwerkdurchsetzungsgesetz (loi d’application du droit sur les réseaux sociaux – NetzDG) n’est que partiellement abrogée. Ces mesures d’abrogation ainsi que l’entrée en vigueur du DSA imposent de nombreuses modifications d’autres textes de loi, qui seront également effectuées. Le volet central est toutefois l’instauration d’une nouvelle DDG, qui regroupe en une seule loi les dispositions actuelles de la TMG, les nouvelles dispositions nécessaires à la mise en œuvre du DSA, ainsi que de nouvelles dispositions portant application du Règlement (UE) 2019/1150. En ce qui concerne la mise en œuvre du DSA, la DDG régit principalement les compétences et la coopération des autorités ainsi que les sanctions applicables. Le projet a d’ores et déjà été discuté au sein du Bundestag en janvier dernier (IRIS 2024-2:1/25). Après saisine du Bundesrat, les principales modifications de la version finale concernent désormais le renforcement de l’implication des régulateurs des médias et l’instauration d’une meilleure cohérence avec la régulation des médias.

L’article 3 de la DDG comporte (en lien avec l’ancien article 3 de la TMG) certaines précisions sur le principe du pays d’origine inscrit dans le DSA, la Directive SMA et la Directive e-commerce, au regard des dérogations possibles conformément aux textes de l’UE susmentionnés. En vertu de l’article 12, paragraphe 1 de la DDG, la Bundesnetzagentur (agence nationale de régulation des télécommunications - BNetzA) devient l’autorité de coordination au sens du DSA et coopère avec les autres États membres, ainsi qu’avec l’organe de coordination des États membres et la Commission européenne. La recommandation de la Commission sur le numérique, reprise par le Bundestag, a notamment permis de renforcer le statut des Landesmedienanstalten (offices régionaux des médias - LMA) en général et de la Kommission für Jugendmedienschutz (commission pour la protection des mineurs dans les médias - KJM) en particulier dans l’application du DSA. La compétence relative à l’application de l’article 14, paragraphe 3, et de l’article 28, paragraphe 1 du DSA en ce qui concerne les mesures préventives structurelles est transférée à la Bundeszentrale für Kinder- und Jugendmedienschutz (office fédéral de protection des mineurs dans les médias - BzKJ), mais uniquement dans la mesure où ces mesures préventives ne concernent pas les mesures prévues par le Jugendmedienschutz-Staatsvertrag (traité inter-Länder sur la protection des mineurs dans les médias - JMStV) dans sa version du 14 décembre 2021. Les organismes désignés conformément aux dispositions légales des Länder en matière de médias sont chargés de l’application de telles mesures préventive en vertu de l’article 28, paragraphe 1 du DSA. Alors qu’il s’agit à cet égard d’un renvoi statique au JMStV dans sa version du 14 décembre 2021, la compétence pour les mesures individuelles concrètes couvertes par l’article 28 paragraphe 1 du DSA, conformément aux dispositions du JMStV, reste, au sens d’un renvoi dynamique, du ressort des instances désignées conformément aux dispositions légales des Länder en matière de médias. De telles mesures individuelles ou la régulation de contenus ciblent les contenus concrets illicites ou frauduleux. Le contenu individuel fait l’objet d’un examen pour déterminer s’il est illicite ou frauduleux et s’il doit faire l’objet d’une mesure administrative.


Références




Liens

IRIS 2024-2:1/25 [DE] Examen du texte de transposition du DSA au Bundestag

Cet article a été publié dans IRIS Observations juridiques de l'Observatoire européen de l'audiovisuel.